Place du Trocadéro, lors des vérifications techniques et de la présentation des véhicules au grand public, l’équipe a fière allure !!! Jugez plutôt :

Un Range Rover n°174 ( Puren / Dumas ) et d’une R5 n°173 ( Daurangeon / Prêchet), peints aux couleurs des deux sponsors de l’équipe Artic/Rubson.

Les deux véhicules, dans leur livrée blanche et marron, sont les rares à arborer ensemble la manifestation d’une équipe structurée à oser affronter l’Afrique pour remporter la victoire. Et cette équipe ne manque pas d’arguments...Deux véhicules qui pourront s’entre-aider et surtout un pilote d’expérience dans ce team en la personne de Gérard Daurangeon au volant de la petite R5.

Gérard Daurangeon n’est pas un inconnu en rallye-raid puisqu’il a déjà participé au 5X5 avec Christian Pouchelon (copilote et préparateur de la R30 de Georges Houel à ce même Dakar). Il a même remporté la catégorie 2 roues motrices sur le rallye crée par J-C Bertrand sur une R17 gordini !! Pourtant, sur ce Dakar, il ne part pas avec son ami Pouchelon, mécanicien en F1 à Renault Sport. Il est contacté par Prêchet , garagiste, qui veut monter un team avec un ami travaillant entre autre dans une entreprise de crêmes glacées, M. Dumas, descendant direct du gand écrivain. L’accord se fait donc au téléphone, Prêchet apporte le budget et Daurangeon la voiture. Le choix est vite fait et se porte sur son véhicule personnel, un R5 Alpine.

La préparation se fera les soirs avec l’aide de pièces issues de Renault Sport mais elle est trop tardive, comme pour beaucoup d’autres concurrents déjà !!!. La caisse est néanmoins renforcée, le train AV et AR sont également renforcés, le moteur est préparé...pas le temps de faire remonter le pot d’échappement sur le toit ni de se procurer des pneus spécifiques ; On verra que toutes ces préparations et oublis auront des conséquences sur le déroulement du rallye. En tout état de cause, le team “Artic/Rubson” est prêt pour le départ. En plus de la R5, un Range vient donc compléter l’équipe. A son bord, Michel Puren et M. Dumas qui se fera inscrire sous le pseudonyme de M. Alexandre, en référence à son illustre ancêtre.

Dès le prologue, si tout se passe bien pour le Range (pour le moment !!), la préparation trop tardive de la R5 montre ses faiblesses : au départ de la première spéciale, l’accélérateur se coince à fond. L’équipage est donc obligé de trouver un moyen de ralentir : c’est le copilote qui s’en charge en tirant sur le coupe circuit avant chaque virage pendant que le pilote joue avec les freins et l’embrayage. A chaque sortie de courbe, Daurangeon rembraye quand le coupe circuit est remis en place et la R5 s’arrache dans une explosion retentissante !! La fin de la spéciale sera finalement atteinte sans plus de problèmes et l’accélérateur sera réparé avant d’arriver en Afrique. Pourtant, dès les premières pistes algériennes, le comportement de la voiture n’est pas satisfaisant. Dans les deux premières spéciales, la R5 est difficilement conduisible en partant dans des grands travers très délicats à contrôler.

A Agadez, une vérification du train Ar montre que celui-ci n’est pas aligné (depuis Paris !!) et qu’il est la cause des problèmes de la Renault. Le lendemain, seul jour où la petite bombe marchera comme son pilote voulait, Daurangeon réalise le scratch !!! ce sera malheureusement le dernier coup d’éclat de la petite R5 !!!

Pendant ce temps, le Range rencontre d’autres problèmes. Puren, qui pilote un jour sur deux, réalise de belles perf tandis que son coéquipier semble moins habile au volant... à tel point qu’il met 2 fois le Range sur le toit.

Ces exploits lui vaudront le surnom de “crème renversée”, puisqu’il apportait le sponsor “Artic”, la fameuse marque de glaces !!!

Et puis, le sable et les premiers cordons de dunes arrivent...en même temps que d’autres soucis pour la R5 et ses occupants : ensablements, crevaisons (25 en une seule étape !!!!), pot d’échappement écrasé, moteur fatigué font que la petite Renault arrive difficilement jusqu’a bamako avec son lot de galères. Le lendemain, l’équipage décide de sortir le moteur et de changer les pistons. La réparation s’effectue mais le temps imparti est passé et c’est la mise hors course pour l’équipage. Le Range du team dont les coéquipiers se sont quelques peu fâchés rencontre lui-aussi des difficultés mais ils décident malgré l’ambiance de continuer.

Le but pour la petite Renault est donc maintenant de rejoindre Nioro puis Dakar pour participer à la fête avec les autres concurrents. Cette poursuite de l’aventure en dehors de la course amène elle aussi son lot de péripéties : des problèmes de batteries font qu’il faut changer celle qui a amené la voiture jusque là. Aucune batterie à la bonne taille n’est trouvée et il faut la remplacer par une plus grosse...qui ne tient pas dans le compartiment moteur. Qu’à cela ne tienne, la batterie est posée devant le copilote qui la tiendra avec ses pieds jusqu’à l’arrivée.

Une dernière difficulté pimentera l’aventure de l’équipage. Au passage d’un gué, la R5, avec ses problèmes d’alimentation cale au milieu d’un fleuve. Pour les quelques billets qui restent à l’équipage, un groupe de villageois africain accepte de pousser la voiture jusqu’à l’autre rive. Mais celle ci refuse de redémarrer. il faut encore la pousser. Les villageois sont d’accord mais la première transaction ne concernait que la sortie du fleuve, rien d’autre.

Daurangeon négocie encore une fois et les autochtones acceptent de pousser en échanges de vêtements. L’équipage arrivera donc à Dakar hors temps le soir de la remise des récompenses en short et tee-shirt sans autre chose pour se changer !!! Le Range quant à lui finit péniblement 67ème sur 74 classés.

Pour terminer, La R5 reviendra en France par le bateau qui rapporte tous les véhicules, en même temps que le Range. Gérard Daurangeon se fera même arrêter après le débarquement pour bruit non-conforme aux normes en vigueur !!! (il faut dire qu’il est depuis un bon moment en échappement libre !!!). Un policier indulgent lui permettra de rentrer chez lui sans contravention !!!

Ce sera le seul Dakar pour Daurangeon, Prêchet et Dumas et l’association de Rubson et Artic sur cette course. Par contre, Michel Puren repartira en 80 puis en 81 sur un Range Pick-up Turbo( !) de sa conception avec son ami Chapel (fiche 1980,fiche 1981).